24 novembre, 2006

Biographie de Jos De Maegd


Par Solange Wonner, directrice de Wolu-Culture
(Dans le catalogue Jos De Maegd exposition Wolu Culture à la Médiatine, Woluwé Saint-Lambert 1989)

Né à Uden (Pays-Bas) en 1917.

• De 1934 à 1940, parallèlement à une formation artistique de jour à l'Institut Supérieur Saint-Luc à Schaerbeek, il suit des cours du soir à l'Académie des Beaux-Arts de Louvain et les cours d'histoire de l'art à l'Université Catholique de Louvain.
• Poursuit par après des études de peinture et de gravure à l'Institut Supérieur des Beaux-Arts d'Anvers.
• En 1943, il devient professeur à l'Institut Supérieur Saint-Luc à Schaerbeek.
• 1946 est une étape importante pour la reconnaissance de son travail artistique: il obtient le Premier Grand Prix de Rome. Séjour à l'Acade­mia Belgica, à Rome.
Est nommé professeur de gravure à l'Académie de Louvain en 1946. • Invité par Robert Delevoy, promoteur du groupe "Apport", il expose en 1947 à la Galerie Apollo à Bruxelles. En dehors des thèmes champêtres (sous l'influence de l'Ecole de Laethem), il présente surtout des figures d'enfants, d'une facture plutôt sombre où le caractère méditatif de l'artiste apparaît. La même année il s'installe à Woluwé Saint-Lambert.
• En 1951, grâce à une bourse d'étude, il effectue un voyage au Congo Belge et au Rwanda où il expose certes mais où il consacre une partie de son temps à donner des conférences sur l'art contemporain. Il traduit son" impression d'Afrique" par de nombreux pastels et aqua­relles.
• Membre de l'atelier libre de dessin de Woluwe-Saint-Lambert (dont Tytgat et Jespers faisaient partie), il fonda avec Albert Pêtre un atelier de gravure (lithographie et eau-forte) en 1954. (En 1968, cet atelier fut intégré au ,,75,,).
• De 1952 à 1958, il séjourne partiellement en Provence, en Espagne et voyage en Yougoslavie et en Grèce. Sa palette s'éclaircit, sa facture devient plus experte, plus virtuose, mais il constate d'autre part que la virtuosité acquise s'accompagne d'une perte en intensité et d'un manque de profondeur.
C'est une période riche en doutes et en interrogations qui s'installe pour le peintre. La vogue est à l'art abstrait. Dans un débat figuratif non-figuratif, avec Jan Burssens, il défend - contre toute attente - l'art de son collègue. Selon lui, tout art est constitutivement " abstrait ", en ce sens que la figuration (l'anecdote) n'est pas essentielle, mais la façon picturale de traiter le sujet. De Maegd croit cependant que la figuration reste un moyen de communication plus adéquat que le non-figuratif. Les faits semblent le contredire. Son oeuvre est jugée trop rébarbative pour les uns, trop sage pour les autres.
Un incident au sujet d'un de ses portraits (une erreur de cliché, lors de l'impression d'un catalogue) lui fait comprendre l'éternel malenten­du entre le motif et son expression picturale.
La lecture des essais de Teilhard de Chardin dissipe définitivement ses doutes sur le supposé manque d'humanisme de l'abstraction décrété par certains peintres et critiques. Dès lors, conscient que la matière est elle-même porteuse de l'esprit, il va exprimer sa vision du monde par les seuls signes plastiques de la matière picturale. " Toute l’œuvre est expression et réflexion sur un univers dont l'élan vital, ancré dans la matière, semble - malgré les heurts et les conflits - tendre vers une unité profonde. Elle signifie non seulement ce jeu d'énergies de la matière, mais plus encore ce «mal de croissance» d'un monde qui se cherche, nonobstant une complexité toujours plus grande”.
Ce revirement vers l'abstrait n'est cependant qu'apparent. Quittant la représentation soit-disant objective, il peut enfin laisser le champ libre à son tempérament foncièrement lyrique.
• Mais la mode est au nouveau réalisme et la vogue lyrique non-figura­tive (dite informelle) est passée. Bien qu'il obtienne une médaille de bronze au Grand Prix d'Ostende en 1960, il doute et se réinterroge. Se rendant compte combien la communication picturale est aléatoire, il s'engage, en tant qu'artiste, de plus en plus dans le domaine social.
• Persuadé que l'enseignement traditionnel est trop fixé sur le ration­nel et l'utilitaire et fidèle à sa conception du monde, il veut stimuler les possibilités créatrices de chacun et fonde les premiers ateliers créatifs pour enfants à Woluwe-Saint-Lambert en septembre 1961 : Il y propose non seulement une prise de conscience toujours plus poussée du monde et de l'humain, mais un engagement authentique.
• Plus tard suivront des ateliers néerlandophones pour adultes (entre autres un nouvel atelier libre de gravure dont il s'occupe encore aujourd'hui). En tant que vice-président du Comité Culturel, il suscite dès 1963 des expositions d'artistes de Woluwé à la Villa Montald, ainsi que des expositions didactiques, entre autres sur "l'art et la société" au Château Malou.
Conférencier et guide au Palais des Beaux-Arts et au Musée d'Art Ancien, il collabore aussi à différents séminaires sur l'art. Publiciste, il écrit régulièrement des articles sur l'art et l'expression créatrice dans différents journaux et hebdomadaires.
Autant il se dépense en activités sociales et pédagogiques, autant il s'intériorise dans son œuvre picturale. Les œuvres des années '60 sont nettement introverties: Humanisation de la terre, Perception d'un songe, On this desert land ...
• Nommé directeur de l'Ecole des Beaux-Arts de l'Etat à Woluwé ­Saint-Pierre en 1973, il prend sa retraite en 1978. Voyage aux Etats ­Unis et en Amérique latine.
• Depuis lors, il réside une grande partie de l'année en Haute Proven­ce. Sa peinture s'en ressent, s'ouvre elle-même sur le monde. La matière gagne en richesse et en profondeur malgré une certaine ascèse. La quête d'harmonie d'un univers en gestation devient plus évident. A. Whitehead et Levinas y sont pour quelque chose.
On pourrait penser qu'un artiste ayant des activités aussi diverses ne peut que se disperser et tomber dans le superficiel. Chez De Maegd, rien de tel. Analogue à la vie, l'œuvre d'art est pour lui un événement, un perpétuel devenir. .. Son engagement social et culturel ne fait qu'un avec son œuvre picturale.
Un autoportrait sur pierre lithographique de 1984 est assez explicite. Un portrait peu flatteur, mais un «vrai» portrait de caractère, sans équivoque, direct, incisif. Un regard en profondeur, scrutateur, in­transigeant même, voulant «connaître», «comprendre», .. Un homme chez qui toute méditation, pour être valable, doit être suivie d'action ...